top of page

Extrait 1

 

SCÈNE 3

Paulo – Greta

 

Paulo

Alors ?

Greta

Alors maintenant, dis-moi pourquoi on nous a refilé un crétin pareil ! Qu’est-ce qu’il veut, monsieur Jean ? Faire foirer l’affaire ?

Paulo

Sache, pour ta gouverne, qu’on ne nous a rien refilé du tout. C’est moi qui ai choisi Riton.

Greta

Toi ? Pourquoi ?

Paulo

Il est jeunot, mais il a des qualités.

Greta

Qui ? Ce petit con ? Il a la cervelle à marée basse. A la moindre embrouille, il nous claque dans les pognes.

Paulo

Il manque d’expérience, voilà tout. Laisse-le piger la réalité de notre boulot tranquillement. Il deviendra grand.

Greta

J’me méfie des petits cons qui deviennent grands. (Un temps) J’te comprends pas, Paulo. On dirait que tu l’protèges.

Paulo

Qu’est-ce que tu vas chercher là ?

Greta

Paulo ? C’est à moi qu’tu parles… Greta. Cherche pas à me bourrer le mou. Alors, c’est quoi l’histoire entre vous deux ?

Paulo

J’ai une vieille dette à effacer.

Greta

Tu vas parler ou j’dois t’faire sortir les mots à coup d’pompe dans le derrière !

Paulo

C’que j’aime chez toi, c’est ton côté fleur bleue.

Greta

Accouche !

Paulo

(Avec un soupir) Bir Hakeim, ça te dit rien ?

Greta

La station de métro ?

Paulo

Non, Bir Hakeim en Lybie.

 

————————–

 

Fondu au noir. Flashback sur deux hommes épuisés marchant dans le désert.

 

Paulo voix off

Juin 1942. Marcel et moi on faisait parti des FFL, les Forces Françaises Libres. Après avoir repoussé l’assaut de l’Afrika Korps, le général Koenig a envoyé un commando en mission sur Tobrouk. Je dirigeais l’expédition. Au retour on a essuyé une fusillade près d’El-Alamein. C’était l’enfer.

 

Scène de fusillade en jeep. On leur tire de dessus et ils ripostent. Des avions passent au dessus de leur tête en tirant des rafales. Marcel se met entre une balle et Paulo et lui sauve la vie. L’homme est en train de mourir dans les bras de Paulo.

​

Marcel : Jure moi que tu t’occuperas de mon gamin, Paulo, jure le moi.

Paulo : Comme si c’était le mien, Marcel. Je te le jure.

 

Marcel meurt. Paulo lui ferme les yeux et le berce tendrement. Fin du flashback.

 

————————–

 

Greta

Et le môme en question, c’est Riton.

Paulo

T’es sacrément perspicace.

Greta

Pour un peu tu m’aurais fait chialer avec ton histoire. J’arrive pas à y croire. C’est pas toi qui parles comme ça ? Pas le Paulo que j’connais, le casse-cou, l’intrépide…

Paulo

Ça n’empêche pas les sentiments.

Greta

 Celui qui fait jaillir la lame de son couteau comme d’autres sortent leur pébroque un jour de pluie.

Paulo

Qu’est-ce que tu veux ?… Faut croire qu’avec l’âge on devient con.

Greta

Arrête de croire, je confirme.

​

​

Extrait 2

​

SCÈNE 25

Les mêmes + Chapon

​

Chapon, levant les mains

Hola ! Doucement les calibres ! Je viens en ami.

​

Paulo fait signe à Riton de remballer son feu, mais de rester sur ses gardes.

​

Chapon

Vous semblez étonnés de ma présence ? Vous ne croyez tout de même pas que c’est par hasard que je vous ai dévoilé la seule faille de ma souricière ? Vous m’offenseriez. J’ai tout de suite compris à qui j’avais à faire. Ce qui nous amène à la proposition que j’ai à vous faire.

Paulo

Une proposition malhonnête, je suppose ?

Chapon

Il faut rester dans le ton. (Un temps) Vous me donnez, disons… Je ne veux pas être trop gourmand… l’intégralité de la somme et je vous laisse partir sans être inquiété.

Paulo

Sinon ?

Chapon

Je vois que vous anticipez. Sinon, il y aura des complications.

Greta

De quel genre ?

Chapon

Du genre que je vous conseille d’éviter chère madame.

Greta

Si les gendarmes donnent dans le malhonnête à présent, à qui se fier ?

Chapon

Que voulez-vous ? L’armée, qui est une mère pour nous, n’a pas toujours su récompenser ses enfants avec tout l’amour qu’il aurait fallu. Et puisqu’on doit en arriver aux considérations bassement matérielles, certains talents et de hautes compétences ont souvent été utilisés et rémunérés bien au-dessous de leurs valeurs. C’est ce qu’on appelle la solde. S’il y a des gens malhonnêtes, je n’ai pas été le premier.

Paulo

Edifiant ! Vraiment ! En fait, vous venez de prêcher pour ma paroisse et nous avons, chacun à notre manière, suivi le même parcours. A l’école de police ou à l’école de voyous on en ressort bien souvent avec le même diplôme. Apparemment, vous, vous avez eu la mention très bien.

Chapon

Merci, mais moi, c’était l’école militaire.

Paulo

Personne n’est parfait !

Chapon

Trèves de palabre. Le sac, s’il vous plait !

Paulo

Qu’est-ce qui nous garanti qu’une fois en possession de l’argent, vous ne nous livrerez pas à vos collègues ?

Chapon

Vous avez ma parole.

Paulo

Je préférerais une garantie plus sûre.

Chapon

Je suis venu seul et sans arme.

Paulo

On nous attend peut-être dehors ?

Chapon

Réfléchissez, ce n’est pas dans mon intérêt. Je serais obligé de rendre l’argent et c’est précisément ce que je souhaite éviter. Si ça peut vous rassurer, sachez que j’ai prévenu tous mes collègues qu’il y avait des amis à moi, ici, des chasseurs et que ce n’était pas la peine qu’ils perdent leur temps à les interroger. Vous voyez, vous êtes en sécurité. Et j’ai gardé le meilleur pour la fin.

Greta

C’est déjà pas mal gratiné, merci.

Chapon

Remettez-moi la jeune demoiselle ! Quand elle sera en lieu sûr, chez ses parents, les recherches diminueront et…

Paulo

Nous savons tous les deux que ce n’est pas Julie qui se trouve à côté, mais…

Chapon

Marie Levasseur, recherchée afin d’apporter toute la lumière sur le kidnapping de son amie. Oui, oui, nous le savons fort bien. (Il se met à rire) C’est pas de chance, hein ! Vous avez le choix entre deux et vous enlevez la mauvaise ! Comme les parents avaient du mal à se délester d’une partie de leur patrimoine, ils m’ont demandé de les conseiller. J’avoue que j’ai un tantinet noirci le tableau. Ainsi, sans que vous vous en doutiez, vous aviez un complice sur place. Alors ? Je ne l’ai pas mérité mon argent ?

Greta, écœurée

Vous savez ce que vous êtes ?

Chapon

Un homme riche ! Si vous faites ce que je vous dis, je m’arrangerai pour que l’enquête en cours suive un chemin opposé à celui que vous aurez choisi. C’est ma proposition et elle est non négociable.

Paulo

J’ai une autre proposition à vous faire. Vous êtes seul, nous sommes trois, alors on vous attrape, on vous ligote et on part avec l’argent.

​

Chapon, sort une arme de derrière son dos.

​

Chapon

Proposition rejetée.

Paulo

Je croyais que vous n’étiez pas armé.

Chapon

Ne voyez pas ça comme un flingue, mais plutôt comme une police d’assurance.

Paulo

La Macif ce n’est plus ce que c’était. Je vois qu’on n’a pas le choix. Riton, va chercher la Julie.

Chapon

Mais auparavant, il va déposer son arme sur la table.

​

Riton s’exécute. Julie entre et découvre la scène avec Chapon tenant en respect le groupe et l’argent étalé sur la table.

bottom of page